La Quête Suprême

« Les êtres vivants naissent et meurent continuellement. Les sensations apparaissent et disparaissent perpétuellement. Les pensées se lèvent et s’évanouissent sans arrêt. Les objets aussi prennent forme et se désintègrent. Les désirs croissent et décroissent. Alors, que demeure-t-il de permanent derrière tous ces mouvements, derrière toutes ces créations et derrière toutes ces destructions incessantes autour de l’être humain et en lui ? N’est-ce pas essentiel pour lui de chercher à connaître en lui-même l’Immuable, en qui la naissance et la mort, et tous ces changements perpétuels n’ont pas de place ? »

Pour connaître cet Immuable, il faut s’intérioriser, apprendre à méditer, à connaitre un moment authentique de pur silence intérieur. Il s’agit, pas à pas, d’expérimenter les conseils précieux développés dans cet ouvrage, plus particulièrement pour le contrôle du mental durant la méditation ; ils sont le fruit de quarante années de méditation intensive de l’auteur.

Edouard Salim Michaël souligne en particulier l’importance de l’habitude : car, dit-il : « L’être humain ne peut éviter d’être une créature d’habitude. Il lui faut instaurer consciemment des habitudes et des tendances qui l’aident dans ses pratiques spirituelles. »

Et pour lutter contre la routine, le chercheur est invité à garder continuellement vivantes en lui des questions brûlantes sur l’Univers, la conscience, le mystère de la vie et de la mort.

Note de lecture – Carnets du Yoga mai 1993 –

Dans « LA QUÊTE SUPRÊME », Salim Michaël donne de précieux conseils pour la méditation et explique, avec clarté, les raisons pour lesquelles l’aspirant peut rencontrer des difficultés à se concentrer. Il montre les effets de l’habitude, une force tenace qui fait rechuter sans cesse le chercheur dans son état d’être coutumier dans lequel il redevient, sans le voir, absent à lui-même et éperdument identifié avec le monde extérieur.

L’auteur évoque également ce qu’il appelle « l’obstacle paradoxal », c’est‑à‑dire le dilemme permanent existant entre la tendance à l’auto-destruction, si subtilement enfouie dans la psyché humaine, et le désir de vivre. Enfin il rappelle l’importance capitale de la compassion face à l’ignorance et aux croyances aveugles ainsi que dans une relation sexuelle.

Si l’on met en pratique les divers exercices qui donnent aux livres de SALIM MICHAËL cet aspect concret si rare et si précieux, on verra combien ceux‑ci se révèlent extrêmement fructueux. Une force étonnante émane de ces ouvrages qui parlent à l’intuition et au sentiment du chercheur, une force issue d’une sincérité tout à fait hors du commun. Ils incitent à la pugnacité, et le lecteur se sentira à la fois éclairé et élevé. Il reviendra sans aucun doute à de nombreuses reprises vers ces livres tout au long de sa vie.

Jacqueline PAUVRASSEAU

Extrait du chapitre 1 – La méditation – 1ère partie l’expérience du Sublime

Toute pratique de méditation a essentiellement pour but d’arriver à décoller l’aspirant de lui-même — le décoller de son individualité ordinaire ainsi que du sentiment habituel qu’il a de lui-même, cristallisé en lui depuis un temps si reculé et, qu’en raison d’un long conditionnement, il croit être sa seule identité — afin qu’il découvre, à l’intérieur de son être, l’autre aspect de sa double nature qui lui demeure habituellement caché parce que son intérêt et son attention sont sans cesse dirigés uniquement vers le monde du dehors.

Derrière l’écran épais de sa forme corporelle, derrière son individualité ordinaire, et derrière son petit monde et tout ce qu’il considère être lui-même, il existe en l’être humain un autre Univers d’une extrême finesse et d’une extrême transparence éthérée, un Univers intérieur indicible et lumineux, qui est sa Véritable Nature, sa Nature Divine.

Pour parvenir à se décoller du sentiment habituel qu’il a de lui-même et de son individualité ordinaire, il lui faut fournir un effort tout à fait particulier, car cela implique l’effort d’accepter d’y renoncer. Mais l’habitude est extrêmement forte et tenace, et, pour la majorité des chercheurs, arriver à un tel renoncement (même partiel) qui constitue, pour ainsi dire, une mort intérieure volontaire, demande de longues années de méditation et de luttes tenaces — à condition qu’ils soient assez sérieux et motivés pour ne pas capituler en route. Il faut qu’ils arrivent à se décoller d’eux-mêmes suffisamment pour créer au moins un certain degré de vide en leur être — un vide indispensable pour leur permettre de reconnaître un tout autre monde et une tout autre conscience enfouis en eux à l’état latent.

Arriver à créer ce vide en soi-même nécessite d’accepter de perdre nom, forme, individualité, désirs, passé, futur, etc. durant tout le temps où l’aspirant tente de méditer, jusqu’à ce qu’il arrive un jour à être empli d’un étrange et profond silence intérieur ; un silence intérieur qui lui était inconnu jusqu’alors et dans lequel il va commencer à sentir s’éveiller en lui, sous la forme de très subtils frémissements, les premières manifestations de son Être Céleste.

Au fur et à mesure que le chercheur réussira à approfondir et à prolonger la durée de sa méditation, il commencera à éprouver le début de la libération et de l’expansion de sa conscience. Sa conscience va lui sembler croître à l’infini et devenir de plus en plus lumineuse, fine et éthérée. En outre, au lieu de la matière dense et pesante de sa forme corporelle qu’il ressent habituel­lement, il éprouvera la sensation indescriptible d’une très subtile et ineffable transparence d’être éthérée.

Une intense nostalgie s’élèvera du fond de lui-même, l’incitant à vouloir se donner pour toujours à cet état d’être inhabituel — qu’il ressentira comme une nouvelle naissance venant de se produire en lui ; mais, en même temps, il réalisera l’impossibilité pour lui d’un tel accomplissement à cette étape de son évolution spirituelle, car il se sentira toujours appesanti et retenu par certains penchants et désirs en son être non encore transmutés. Il faut prendre en considération le fait qu’il existe différents degrés d’illumination — selon le niveau d’être et de conscience du chercheur — et que, pour la grande majorité des aspirants sur le Sentier, l’illumination (s’ils y parviennent) ne signifiera pas leur libération. Ils peuvent même (à cause de certaines vieilles tendances encore vivaces en eux) en être encore loin. (…)

Après ce qui vient d’être dit sur le but de la méditation, il faut néanmoins être préparé à accepter le fait que la pratique de la méditation ne peut, en aucune manière, être facile, surtout pour un débutant. La concentration soutenue exigée pendant la méditation — concentration qui est d’une importance fonda­mentale dans toute pratique spirituelle sérieuse — peut même se révéler pénible pour certaines personnes. Car toute concentration spirituelle a justement pour but de décoller et de détacher l’aspirant de lui-même et de ce qu’il est habituellement pour le contraindre à demeurer dans le présent — ce qui est tout à fait contraire à ce qu’il a coutume de faire.

Ordinairement (sauf à de très brefs moments de présence fugitifs ici et là), l’esprit de l’être humain ne cesse de vagabonder sans contrôle dans le passé ou d’être occupé par l’appréhension (justifiée ou non) du futur — avec tout ce que celui-ci peut lui apporter comme problèmes à résoudre le lendemain, la semaine d’après, ou l’année suivante. Il faut vraiment des conditions exceptionnelles (telles que danger pour son corps, maladies mortelles, accidents, désastres naturels, etc.) pour le contraindre à rester dans le présent. Et même là — tout dépend du type de la personne ainsi que de son niveau d’être — sa présence, de par son conditionnement, peut être tout à fait partielle et mêlée à ce que son moi ordinaire appréhende ou veut et ne veut pas inconsciemment.

C’est justement cette contrainte de devoir demeurer dans le présent au cours de sa méditation qui prend le débutant par surprise et le rebute. Car, tout le temps durant lequel il a grandi, il n’a fait que laisser ses pensées et ses émotions couler passivement là où bon leur semblait — tout comme l’eau d’une rivière qui coule dans la direction qui lui oppose la moindre résistance, c’est-à-dire : la descente.